Reading: Arrêtons de manger de la merde de Jean-Pierre Coffe
En ayant trouvé par hasard, puis lu le livre Arrêtons de manger de la merde de Jean-Pierre Coffe, je me suis dit qu’un billet de blog serais bienvenue. Le voici.
Le livre décrit les changements des produits alimentaires depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. De long en large, J.-P. Coffe explique leurs qualités nutritives ou gustatives, les méthodes de production, leurs parcours historiques pour arriver dans notre assiette. Enfin, il nous donne des conseils pour mieux choisir nos produits en magasins. « Pour vous aider à vous nourrir sainement, ce livre vous propose un vaste décryptage sur le monde alimentaire. » Bref, le sujet est vaste.
Et l’auteur sais de quoi il parle ! Il a été dans le milieu gastronomique durant toute sa vie. Il a d’ailleurs reçu plusieurs distinction à ce sujet. Son enquête s’appuie sur son expérience personnelle et a le soutien de Leader Price. Pourtant, le livre n’épargne aucune enseigne et se concentre plutôt sur les produits eux-mêmes.
Avec ce billet de blog, j’ai envie de partager des informations recueillies dans le livre. Je suis partagé sur les informations concrètes, qui datent néanmoins de maintenant 8 ans. Les réflexions et chiffre présentés datent par conséquent de 2013 ou antérieur, sauf mention contraire. Il m’est difficile de savoir si qui est encore d’actualité, mais ses propos sont toujours bon à prendre. Alors commençons:
🍼 Le lait
Les productrices de lait ont maintenant un mode de vie en stabulation. Elles sont nourries à l’ensilage de maïs et tourteaux de soja. L’herbe n’est plus provisionnée pour elle. En fin de vie, elles partent à l’abattoir (sans véritablement faire du muscle ou de la viande de qualité).
Il existait plusieurs races de vaches laitières qui donnaient 2500 à 3500 litres de lait par an. Pour des raisons de productivité, elles ont été remplacé par la race Prim’Holstein, produisant 10 000 litres par an, et jusqu’à 18 000 pour la plus productive. Cependant, ces litres supplémentaires se font au détriment de la qualité du lait, plus pauvre en nutriments.
Avec la même idée, quelle est la différence entre lait écrémé, demi-écrémé et écrémé ? Oui le taux de matières grasses, mais pas seulement. Plus le lait est pauvre en matières grasses, plus il est aussi pauvre en nutriments essentiels ! On a:
- 3,5% pour du lait entier
- 1,6% pour du lait demi-écrémé
- 0,1% pour du lait écrémé. Au niveau nutritionnel, il s’agit d’eau 😞
Le lait U.H.T. (Ultra Haute Température) est lui aussi pauvre en nutriments. Ils sont détruits à cause de la haute température. Il en va de même pour du lait pasteurisé.
Si vous entendez parler de lait enrichi, il s’agit d’une escroquerie ! Le lait est par nature riche en nutriments et ceux-ci conviennent à l’humain dans le cadre d’une alimentation équilibré. C’est simplement un argument marketing ! Le lait enrichi est une manière de masquer un lait de base pauvre en nutriments.
🧀 Un dérivé du lait: le fromage
La majorité des fromages vendus en grande surface est crée à partir de lait pasteurisé de vaches Prim’Holstein. Le lait est pauvre et la pasteurisation tue l’authenticité (cf: une section de l’article Wikipédia sur la pasteurisation). C’est pour cela que le goût d’un fromage reste le même, indépendamment de la provenance du lait (coucou caprice des dieux et ton goût identique pour tous les fromages, partout en France).
Les AOC sont néanmoins des valeurs sûres. Le reste des fromages est un bazar et les noms sont imprécis. En résumé, c’est difficile de s’y retrouver correctement. Le lait a-t-il été pasteurisé ? D’où vient-til ? Quelle est la durée d’affinage ? …
Un exemple est l’emmental, qui était normalement produit en Suisse. Il avait une période d’affinage de plusieurs mois afin qu’il matûre en goût avec une croûte à l’extérieur. Il est maintenant produit partout avec une durée d’affinage de 42 jours. Il possède par conséquent peu de goût. On remarque aussi que ces fromages sont vendus sous vide emballé dans du plastique, ce qui empêche la formation de croûte: le fromage a d’autant moins de caractère.
On retrouve aussi le gruyère, qui n’est en réalité pas normé. C’est un dérivé de l’emmental, mais sans règle de fabrication… Le gruyère est fait avec du lait, du reste, on n’en sais rien. Lorsqu’il y une surproduction de lait en règle générale, elle finit en gruyère.
Un dérivé du lait: le yaourt
Puisque la France a historiquement une production de lait trop importante, l’industrie se met à diversifier les produits laitiers pour écouler les stocks. On retrouve les yaourts !
Comme pour le lait: si c’est pauvre en nutriment, ils sont enrichis. Donc à éviter. Le marketing est poussé dans le domaine, puisque la qualité ne suis pas de toute façon ! Les yaourts sont aromatisés pour cacher la misère gustative, mais un bonne confiture fait bien mieux l’affaire; les yaourts “minceur” sont pauvres en graisses mais enrichis en glucides pour garder leur texture; ceux “pour le transit intestinal” qui n’ont finalement rien de particulier si ce n’est un effet placebo… Bien joué le marketing pour vendre, vous êtes fort.
Un yaourt est un yaourt, ce qui est ajouté après est superflu.
🥚 Les œufs et les ovoproduits
Un ovoproduit est un produit fabriqué à partir d’œuf. Les œufs à partir de poules. Ces poules pondent maintenant tous les jours car rendement oblige. Elles sont majoritairement de race Isa Brown, crée par croisement génétique par des scientifiques américains. Il s’agit de la seule race pouvant supporter la captivité des entrepôts en cage, sans se promener à l’extérieur et pouvant pondre presque un œuf par jour.
On distingue les poules élevées en « plein air » (4m² pour chacune, sortie pendant quelques heures durant la journée), « Label Rouge » (5m² pour chacune, avec sortie quelques heures), et « bio » (6m² en intérieur, 4m² en extérieur, alimentée avec des produits issus du l’agriculture biologique). Sisi les poules « bio » ont légalement moins d’espace dehors que les labels rouges 🤯 Le bio est certes un gage de qualité, mais il est bien expliqué dans le livre que la qualité des nutriments de l’œuf dépend surtout de la race de la poule et de son alimentation. L’étude en question a été retrouvé par votre dévoué et est disponible sur le site de l’ANSES (p. 51-52). Enfin, les poules finissent majoritairement en nourriture pour animaux à la fin de leur vie.
Et les œufs alors ! Déjà, quelle est la différence entre les œufs dit « frais », « extra-frais » et le reste des œufs ? Voilà on n’est pas vraiment renseigné sur le sujet.
Les œufs « frais » ont une DLC allant jusqu’à 28 jours après le jours de ponte, 9 jours pour les œufs « extra-frais ». Pour savoir la date, rien ne vaut l’indication « pondu le ». Elle n’est cependant pas présente partout. Et pour cause, les œufs se gardent originellement 2-3 semaines après le jour de ponte; mais on peut augmenter la DLC en ajoutant du conservateur E200 à l’alimentation des poules. Ces derniers œufs se gardent 60 jours !
L’E200 est un perturbateur des systèmes enzymatiques du corps humains 👎, donc les œufs contenant des traces d’E200 sont à éviter.
Les qualités nutritives de l’œuf sont excellentes. Dans un œuf de 60 grammes, on retire 6 grammes de coquille, il reste 37 grammes de blanc et 17 de jaune. La jaune contient 70% de lipides, riches en acides gras insaturés, des vitamines (A, B, D, E, K) et procure 25% de l’apport en phosphore recommandé pour un jeune enfant, 15% pour un adulte. C’est aussi une bonne source de fer ‒ de 2 à 3 grammes pour 100 grammes, et 30% de protéines pour 88 à 95 calories.
La taille de l’œuf est proportionnelle à l’âge de la poule ayant pondu l’œuf: plus il est gros, plus elle est agée. Vous ne le saviez pas, moi non plus, maintenant on sais.
À propos de la poudre d’œuf, maintenant utilisé en grande quantité par la restauration, elle est aussi de plus en plus utilisée dans les produits vendus en magasin. Son problème ? On ne connais pas l’origine des œufs ayant servi à fabriquer cette poudre. Les conditions de production de ces œufs sont absentes de ces emballages.
Le livre passe aussi en revue d’autres ovoproduits. 😄
🐟 Le poisson
Il n’y a plus de poisson dans les océans ! Ce n’est pas une blague, les poissons deviennent rares à cause de la pêche intensive. Par conséquent, la plupart d’entre-eux sont maintenant élevés dans des fermes (coucou la Norvège).
L’alimentation de ces poissons dans les fermes restent bien souvent inconnue. Des éleveurs ont confirmés que selon le cours des produits, ils leurs aient arrivé de donner de la farine de poisson… au poisson. Aussi le bio ne certifie pas une alimentation de qualité pour les poissons.
En 2010, l’association Green Warriors dénonce des malformations chez 10 à 20% des poissons élevés en ferme. La surpopulation en serais la cause. Voilà, ce n’est pas tout rose.
Ce que recommande Jean-pierre, c’est alors de relativiser. En 1970, on pouvait se payer 6kg de saumon par mois avec un smic, maintenant on atteint les 200kg. Il recommande alors de toujours payer un prix plus élevé pour avoir de la qualité: quitte à avoir du poisson, autant qu’il sois bon et provenant d’une bonne ferme d’élevage ! L’environnement s’en portera d’autant mieux.
En bref, le tilapia et le panga sont à bannir. Autant que le poisson pané et le surimi sont à éviter pour les nutriments qu’ils apportent: c’est de la merde et bien souvent fabriqué de façon pas très charli. Les crevettes aussi, sauf la Palaemon serratus au large de Grandville (ou la label rouge). On peut néanmoins se tourner vers le maquereau, le chinchard, le hareng ou le tacaud qui sont faciles à élever. Pour le reste, eh bien, c’est compliqué et il faut toujours aller au cas par cas ¯\_(ツ)_/¯
🍖 La viande
Tout comme pour les vaches, la stabulation a remplacé le pâturage pour les animaux d’élevage. Le rendement et la standardisation sont importantes pardi ! Par viande, on distingue plusieurs races décrites dans les paragraphes suivants.
Le bœuf ou plutôt la viande vendu comme bœuf s’agit à 79% de vaches laitières (70% sont des femelles et 9% des gémisses. Le bœuf est parfois du bœuf, souvent de la vache laitière.
Le veau est néanmoins le plus commun parmi l’élevage intensif dédié à la production de viande. Plusieurs types de veau sont élevés: le premier est le taurillon, élevé et abattu en moins de 24 mois. Il atteint alors 500 kg en un temps record ! Il y a ensuite le broutard, qui grandît pendant 9 à 10 mois dans l’herbe, puis vendu en tant que « jeune bovin » dans les supermarchés ou en l’Italie. Enfin le veau « Ségala » ou « d’Aveyron » sont élevé sous la mère et leur viande est labellisée :thumbsup:
Concernant la viande hachée, elle provient de vaches laitières, de taurillons engraissés ou de viandes importées. Attention à l’étiquette !
Le cochon « Pig 26 » est élevé comme les poules en batterie. L’auteur note ici que les cochons sont souvent abattus en Allemagne, comme la main d’œuvre est moins chère.
Pour le reste, le livre rentre plus dans les détails et fournit d’autres informations, notamment sur l’histoire des élevages et des abattoirs.
🍎 Les fruits et légumes
Le principe derrière des fruits présents toutes l’année sur les étalage est la désaisonnalisation: les fruits et légumes ne sont plus liés aux saisons. Les producteurs peuvent contrôler l’environnement. Ainsi c’est répandu la culture hors-sol qui permet une production standardisée et tout au long de l’année.
Nous avons différents fruits et légumes détaillés dans le livre. En voici quelques uns:
La fraise est très apprécié et est un des fruits désaisonnalisés. La variété camarosa est majoritairement disponible en étalage, puisqu’elle est précoce, productive et s’adapte bien au climat. :thumbsup: Elle est cependant pauvre gustativement. 👎 Il y a aussi la « long-life », qui comme son nom l’indique, mets du temps à pourrir après la cueillette. Cette dernière est cependant pauvre en nutriments: cueillies à 4 semaines, elle contient 200 fois moins de fer, 15 fois moins de magnésium, 5 fois moins de calcium et 15 fois moins de manganèse que les autres. Selon l’auteur, le mieux est de favoriser les fraises française qui sont de qualité.
La pomme a eu un passé compliqué: tout le monde a voulu en faire, sans respect pour les besoins de chaque espèce (granny, golden, …). Ainsi s’explique les pommes insipides en magasin. Pourtant ces espèces sont, avec de bonnes conditions, riches gustativements et en nutriments. De plus près, on remarque que les pommes vendues sont indépendantes de la région: les variétés régionales ne sont plus vendues. L’association nationale des croqueurs de pommes sauvegarde au possible ces différentes variétés de pommes.
Les ananas ! L’ananas standardisé s’appelle le MD-2, juteux et sucré, mais il est peu parfumé et sans acidité comme l’ananas d’origine. Il sont cueillis à la date de départ du bateau (puisqu’ils ne sont pas produit à côté), et peuvent ainsi être fade.
De la même manière, les bananes de qualité sont compliquées à avoir en France métropolitaine. Quatre catégories sont font la concurrence: les françaises, la Del Monte, la Chiquita et la Dol. Celles françaises produites en Martinique ou en Guadeloupe sont cueillies à la date de départ du bateau. Elles sont donc bien souvent âcre et insipide. Pour remédier partiellement à ce problème, elles sont stockées 10 à 16 jours sous température contrôlée pour leur laisser le temps de mûrir. Celles de Del Monte, Chiquita et Dol sont bourrés de pesticides et d’hormones de croissance. Compliqué de faire un choix donc.
Il existe aussi des fruits de quatrième gamme, qui se se reconnaissent en général par leur emballage sous-vide ou leur sachet imperméable. Cependant, les fruits et les légumes ont besoin d’oxygène (pour garder leurs propriétés organoleptiques) et de pruine. De plus, cette quatrième gamme est interdite à l’alimentation des animaux sous label AOC, sûrement pour une raison… Bon en prenant du recul en 2021, il semblerais que certains se sont lancé dedans en essayant de fournir des produits bio de qualité. Ils restent cependant marginaux.
En effet dans le bio, il y a deux catégories: l’industriel et le traditionnel (qui perd son sens en 2021 car il y a beaucoup de R&D en faveur de la qualité des aliments et de l’environnement mais gardons les appellations du livre). Les deux se distinguent car l’industriel se limite au cahier des charges techniques, alors que le bio traditionnel prend en compte l’impact environnemental et sociétal. Le conseil de l’auteur pour avoir des fruits et légumes de qualité et de saison est simple: aller voir le maraîcher du coin 😉
🥫 Les conserves
Il existe plusieurs types de conservation:
- l’apertisation: leurs qualités organoleptiques sont altérés
- la semi-conserve: elle préserve les qualités organoleptiques de l’aliment de base. 👍
- l’U.H.T déjà décrit dans la partie concernant le lait, où les nutriments de l’aliment sont dégradés
- la pasteurisation: les qualités organoleptiques et nutritives sont altérés.
- le sous-vide altère lui-aussi les qualités organoleptiques de l’aliment
Du point de vue industriel, on peut repérer les mauvaises conserves par leur forte concentration en eau et en arôme. De un il vaut mieux regarder le poid sec, et de deux, beaucoup d’arômes indique que l’aliment est de qualité médiocre.
Les aliments se conservant le mieux en conserve (en gardant leur qualités nutritives et organoleptiques) sont les lentilles, les haricots rouges, les pois chiches et les coeur de palmiers. Là-dessus, on peut y aller :thumbsup: Sinon la semi-conserve est top. Elle est cependant rare. La conserve est et reste un bon refuge en cas de nécessité.
❄️ Les surgelés
Ah là c’est bref ! Il y a là un principe: quand on congèle de la merde, on mange de la merde. La contraposée est vraie aussi: quond on congèle de la qualité, on mange de la qualité.
Les pizzas et produits transformés surgelés sont à éviter. On ne connais pas leur méthode de fabrication, les aliments proviennent souvent des 4 coins du monde sans traçabilité. Mis à part cela, pour le reste, on peut y aller :thumbsup:
📝 Quelques remarques pour finir
L’arôme est un “cache misère de l’agroalimentaire”. Il détourne le goût original du produit. Si le produit est de qualité, il aura du goût et se passera bien d’arôme.
Le couple mondialisation-marketing tue la diversité du terroir et la liberté de choix. Les produits sont standardisés et le goût uniformisé. Aussi bien à dessein afin de “booster” le goût du produit, que pour avoir un produit identique vendu partout dans le monde.
S’il est indiqué « huiles végétales » ou « matières grasses végétales » dans la liste des ingrédients du produit, c’est bien souvent de l’huile de palme derrière.
L’auteur note aussi qu’un tiers des écoliers ne savent pas reconnaître un poireau, une figue ou un artichaut. On laisse ici travailler l’imagination pour savoir les problèmes que cela pourrait engendrer à l’avenir !
En fin
Bien que Jean-Pierre Coffe dénonce cette dénaturation des produits, il me semble aussi bon de rappeler que l’hygiène doit primer sur les qualités organoleptiques, particulièrement en restauration collective. Là-dessus, il s’agit d’une affaire de compromis.
Pour aller plus loin, le journal Slate a publié un article sur ce livre qui exprime d’autres idées du livre et de l’auteur.